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Héritières de la Shoah aux côtés des Palestiniens

 Une tribune libre publiée il y a quelques mois dans le journal "L'humanité". Pour qu'il ne soit plus possible de taxer
de taxer d'antisémitisme toute condamnation de la politique israélienne ; pour combattre aussi l'antisémitisme
qui n'est porteur d'aucune solution pour le peuple palestinien.


Profondément choquées que le CRIF ait décidé d’exclure de son dîner annuel le PCF, nous éprouvons le besoin de nous exprimer en tant que militantes communistes de culture juive. Nous nous sommes senties très concernées par la tragédie de Gaza, nous avons participé aux manifestations pour l’arrêt des massacres.
L’amalgame entre terroristes, antisémites et manifestants pour les droits humains est inadmissible. Nous en avons assez que soient qualifiés d’ennemis d’Israël ceux et celles qui sont solidaires du peuple palestinien et qui s’opposent à la politique belliciste de l’État d’Israël. Nous avons donc une vraie divergence avec le CRIF.
Pourtant le CRIF est né pendant l’Occupation allemande et ses objectifs étaient « la défense du judaïsme, des juifs et des droits de l’homme ». Fidèles à cette histoire et à ces engagements, nous nous indignons des crimes de guerre commis par l’armée israélienne faisant plus d’un millier de morts civils, utilisant des armes chimiques, bafouant le droit international et les résolutions de l’ONU, quand le CRIF ne fait que « déplorer les victimes civiles ». Les droits humains sont par définition universels, il ne saurait y avoir deux poids deux mesures. Loin des procès d’intention, la paix ne peut naître que du débat rationnel et d’un dialogue ouvert.
Nous avons été profondément marquées par ce qu’ont subi pendant la Seconde Guerre mondiale nos parents auxquels on a volé leur jeunesse. Une grande partie de leur famille a été exterminée. Comme beaucoup d’enfants juifs de l’après-guerre, notre enfance a été hantée par le fantôme de la guerre, l’inimaginable absolu de la Shoah. Il a fallu apprivoiser la peur de l’horreur pour tenter de comprendre, être à la hauteur de la chance de nos parents survivants.
Nous ne sommes pas croyantes en Dieu, mais nous sommes juives et nous l’avons toujours revendiqué. Le yiddish est notre langue maternelle, celle des premiers mots d’amour, celle des berceuses. Le yiddish a pour nous la voix de notre mère, cette langue est notre racine, la seule terre qui nous relie à l’histoire de nos ancêtres. Notre judaïté est un bien culturel précieux assumé à travers la célébration des fêtes pour se souvenir et transmettre.
C’est la raison pour laquelle nous sommes particulièrement sensibles à la persécution dont est victime le peuple palestinien. Il est révoltant que le gouvernement d’Israël prétende mener sa politique de colonisation au nom de ce que les juifs ont enduré. Certains juifs justifient aujourd’hui les exactions de l’armée israélienne et du gouvernement d’Israël contre le peuple palestinien par les souffrances subies pendant la guerre. Les Palestiniens ne sont pas responsables de la Shoah. Seuls la reconnaissance, le respect réciproque dans la dignité pour les deux peuples peuvent permettre de trouver une solution négociée.
Les chiffres publiés récemment concernant les actes antisémites commis en France nous inquiètent beaucoup. Ils indiquent une forte augmentation dans les deux derniers mois. Nous pensons nécessaire de faire la clarté. Il faut dire aux Français de toutes origines et de toutes confessions que le conflit israélo-palestinien n’est pas un conflit religieux entre juifs et musulmans, mais qu’il s’agit d’un problème politique. La solution est connue depuis 1947 : celle du droit à l’existence de deux États pour deux peuples. L’usage de la force conduit au désastre pour les Palestiniens mais aussi pour les Israéliens. La condition de la paix est le respect du droit international et des résolutions de l’ONU. Sur cette base, le dialogue, avec les jeunes des quartiers populaires en particulier, peut faire reculer les tentations d’antisémitisme et de racisme.
Mais cela ne suffit pas. Au moment où les négationnistes se manifestent ouvertement par des prises de position d’intégristes catholiques d’extrême droite, la lutte contre l’antisémitisme nécessite que les forces politiques, syndicales et associatives s’engagent résolument pour faire connaître l’histoire, aider à comprendre les causes et les responsabilités. La raison doit retrouver toute sa place, même s’il s’agit d’une raison sensible. Ce combat est de toute actualité.
Henriette Zoughebi, conseillère régionale d’Île-de-France
et Ernestine Ronai

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